Le nombre de détenus dans les prisons françaises est en baisse par rapport au chiffre d’octobre 2019 (70.818) mais en augmentation par rapport au 1er janvier 2019 (70.059), avec 71.061 personnes incarcérées, selon les chiffres de l’administration pénitentiaire publiés le 31 janvier 2020. Ainsi, 82.860 personnes étaient placées sous écrou, dont 12.209 sous surveillance électronique ou à l’extérieur.
Cette augmentation s’explique surtout par une forte hausse du nombre de personnes prévenues en détention ; elles représentent aujourd’hui 29,8% des personnes détenues.
Le nombre de personnes écrouées non détenues est en augmentation de 9,1% par rapport au 1er janvier 2019. Il y a une petite hausse du nombre de placements sous surveillance électronique (11.558) mais on est en dessous du chiffre de juillet 2019 : 11.615. Quant aux personnes en placement extérieur non hébergés, elles sont 651.
Pour finir, depuis le record de 894 mineurs détenus en juillet 2019, la baisse du nombre de mineurs écroués se poursuit avec 816 mineurs.
La densité carcérale, à 115,7 %, reste stable sur l’ensemble des Directions Interrégionales et des établissements.
Pour avoir l’ensemble des données chiffrées, rendez-vous sur le site du Ministère de la Justice en cliquant ici.
La mesure mensuelle de l’incarcération au 1er octobre 2018 est accessibleici.
La réinsertion des personnes détenues : l’affaire de tous et toutes
Saisi par le Premier ministre sur la question de la réinsertion des personnes détenues, le Conseil Economique Social et Environnemental (CESE) a élaboré un rapport qui fait suite à un avis qu’il avait émis en 2006, dans lequel il s’inquiétait de retards pris dans la concrétisation de l’objectif de réinsertion.
Dans ce récent rapport, le CESE relève des points favorables intervenus depuis : la création du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, la consécration de la mission de réinsertion confiée aux Services pénitentiaires d’insertion et probation (SPIP), le renforcement de l’individualisation des peines.
Mais, il relève que le nombre de personnes détenues continue à s’accroitre, sans lien avec l’évolution de la délinquance. Les personnes détenues sont aujourd’hui près de 71 000. Plus de 20 000 vivent dans une structure pénitentiaire (sur)occupée à plus de 150%. Dans les maisons d’arrêt, le taux d’occupation moyen dépasse 138%. Dans ce contexte, la priorité de l’administration pénitentiaire, à savoir la sécurité passe avant la préparation de la réinsertion.
Le CESE met en exergue des points dont il regrette l’insuffisante connaissance par le public :
– La détention ne contribue pas à la réduction de la délinquance et de la récidive
– Son coût est bien plus élevé que celui des alternatives à la détention, qui sont insuffisamment utilisées, comme les aménagements de peine
– Les populations jeunes, défavorisées, précaires, en mauvaise santé sont surreprésentées dans les prisons
– La détention les prive souvent de leurs droits, de leur capacité d’exercer un emploi et d’assumer leurs responsabilités, et elle accentue leur précarité
– Elle désocialise, déresponsabilise, conduit plus à la désinsertion qu’à la réinsertion
Tout ceci conduit le CESE à souhaiter des changements en profondeur.
Vous trouverez d’abord, un état des lieux de la détention et des autres mesures de justice, états des lieux sur lequel le CESE se fonde pour établir ensuite ses propositions. Ensuite, ce sont les préconisations du CESE qui seront présentés telles qu’il les a lui-même formulées.
L’enquête de 2018 sur les représentations des Français de la prison est la 4ème édition d’une étude lancée par le Genepi en 1995, entièrement reprise par le bureau des statistiques et des études de la Direction de l’Administration Pénitentiaire depuis 2007, avec la sous-direction des statistiques et des études du ministère de la Justice. Il s’agit d’un questionnaire visant les personnes majeures résidant en France métropolitaine, pratiqué de façon aléatoire par téléphone en mai et juin 2018. Conduit par l’institut Ipsos auprès de 3002 personnes. Les thématiques : les représentations des Français des personnes en prison (personnes détenues et personnels de surveillance), les conditions de vie en prison, la justice pénale et les évolutions souhaitées.
Une représentation assez réaliste des
caractéristiques socio-démographiques des personnes détenues
Les Français se
représentent une population détenue comme une population jeune, principalement
masculine, avec une part importante de personnes étrangères et sans emploi. Ils
évoquent avant tout des personnes détenues pour des infractions relatives aux
biens et aux stupéfiants.
Une population détenue jeune : pour
70% des personnes interrogées, la majorité des détenus a moins de 30 ans, ce
qui est en fait le cas de 43 % des détenus au 1er octobre 2018.
Les femmes sont vues à juste titre
comme minoritaires en détention. La part des femmes écrouées, en fait 4% au 1er
octobre 2018, est toutefois surestimée puisqu’une grande majorité des
répondants pensent qu’il y a près d’un tiers de femmes en détention, et que
seulement 2% pensent qu’elles représentent moins de 5% des personnes détenues.
A noter que les femmes questionnées
imaginent une part plus élevée de femmes en détention que les hommes.
Les personnes interrogées surestiment
la part des étrangers dans la population des personnes détenues et ceci
d’autant plus que leur niveau d’études est faible. En effet, alors que la part d’étrangers
parmi les détenus est de 23% au 1er octobre 2018, 60% des personnes interrogées
pensent que c’est plus d’un cinquième des personnes détenues qui sont de
nationalité étrangère, et pour 20% ce serait même plus de la moitié des détenus.
Ceux qui ont un niveau de diplôme moindre surestiment la proportion de
personnes étrangères en prison : ceux qui n’ont pas le baccalauréat (29%) sont
deux fois plus nombreux que les BAC+3 et plus (14%) à penser qu’il y a une
majorité d’étrangers dans les prisons.
Des personnes détenues qui inspirent
la crainte
Les personnes interrogées éprouvent
une certaine crainte à l’égard de la population détenue. Quant aux appréhensions
qu’ils auraient s’ils venaient à être incarcérés, les violences physiques ou
psychologiques des codétenus, l’insécurité, le racket, reviennent dans 30 % des
réponses données. C’est donc le fait de côtoyer d’autres personnes détenues qui
est le plus craint par les personnes interrogées, plus encore que la condition
de personne détenue et la privation de liberté.
De la considération et peu de défiance
pour les personnels de surveillance
Bien que
l’exercice professionnel du surveillant soit parfois méconnu dans ses réalités
quotidiennes, la perception globale qu’en ont les personnes interrogées est
homogène : il s’agit d’un métier aux conditions de travail difficiles, qui
inspire de la considération.
Quant aux craintes qu’ils auraient à
être incarcérés, les Français ne citent les surveillants que pour 2% comme objet
de ces craintes.
Pour 9 sur 10 des interrogés, ce
métier est un métier de relation humaine, d’ordre et de sécurité, et elles ne
souhaitent pas le voir privatisé.
Pour autant, seuls 9% des enquêtés
aimeraient effectuer ce travail. 95% le considèrent comme étant dangereux, et
quasiment autant déplorent son manque de reconnaissance et de trop faibles
effectifs.
Des conditions de détention perçues
comme difficiles
Les représentations des conditions de
détention regroupent la façon dont les personnes interrogées se représentent
les biens auxquels ont accès les personnes détenues, dont ils perçoivent
l’occupation des cellules ou encore dont ils envisagent les droits des détenus.
Une
représentation parcellaire de l’accès aux biens en détention
Les
personnes interrogées savent qu’il existe des biens gratuits et des biens
payants en prison. Ils ont toutefois tendance à surestimer le champ des biens
gratuits et à sous-estimer celui des biens payants.
Par
exemple, la gratuité du téléphone fixe est particulièrement surestimée : plus
de 40 % des personnes interrogées pensent que les détenus y ont accès sans
payer ce qui est faux.
Des
représentations marquées par la surpopulation et le manque d’intimité
La grande majorité des Français se
représentent en effet des prisons sur-occupées. Pour 87 % d’entre eux, la
plupart des prisons françaises accueillent plus de personnes détenues qu’elles
n’ont de places et 33 % pensent que c’est le cas pour toutes les prisons. La
surpopulation est d’ailleurs le premier sujet concernant les prisons françaises
cité comme le plus marquant.
Le
manque d’intimité du fait de la surpopulation est aussi la troisième crainte de
l’incarcération la plus donnée. L’idée d’un lieu sans intimité est d’ailleurs
partagée par les deux tiers des personnes interrogées qui se représentent par
exemple des toilettes rarement, voire jamais cloisonnés à l’intérieur des cellules.
Une
vision faussée des droits des détenus
Si les Français
interrogés sont conscients du droit des personnes détenues à pratiquer leur
religion et à accéder à l’assurance
maladie, ils ont pour le reste une vision assez déformée des droits en
détention.
Une très large majorité de personnes
pense à raison que les détenus ont le droit de pratiquer leur religion (93 %)
et ont accès à l’assurance maladie (81%). De même, les personnes interrogées
sont bien au fait que les personnes détenues n’ont pas le droit de posséder un
téléphone portable (86 %).
Les personnes détenues ont d’autres
droits, peu connus par les personnes interrogées.
Par exemple, alors que la majorité des
personnes détenues a le droit de vote, seulement 37 % des personnes interrogées
pensent qu’ils conservent ce droit de voter.
Au
contraire, les personnes interrogées peuvent se représenter certains droits en
détention auxquels les détenus n’ont pourtant pas accès, tel le droit d’accès à
internet.
Une attitude complexe à l’égard du phénomène de la peine d’incarcération
En premier lieu la suppression de
la prison n’est pas envisagée…
Les personnes
consultées ne remettent que très peu en cause l’existence de la prison (4%).
Les rares personnes qui envisagent sa suppression sont plutôt jeunes et
diplômés.
Ainsi, parmi les 18-34 ans, 10% des
diplômés de niveau bac+3 ou plus sont favorables à la suppression des prisons.
Cette opinion radicale sur le devenir de la prison va de pair, chez les plus
jeunes, avec la perception accentuée de difficultés inhérentes à
l’administration de la prison.
Au-delà, la plupart des personnes
interrogées expriment une volonté de durcir l’application des peines. Trois
quarts pensent que les personnes condamnées à perpétuité doivent réellement
rester en prison à vie. 80% pensent que certaines infractions ne sont pas assez
punies, pour seulement 39% qui pensent que des infractions sont trop punies.
Là
encore les plus diplômés sont plus tempérés : les partisans de
l’application stricte de la peine sont 61% chez les diplômés au moins bac+3,
contre 80% chez les non diplômés.
… mais le développement des peines alternatives est plébiscité
87 % des personnes interrogées sont
favorables au développement de mesures permettant d’exécuter une peine hors de
la prison, telles le travail d’intérêt général ou le bracelet électronique.
Cette volonté est encore une fois plus forte parmi les plus diplômés.
Et ceci n’est pas incompatible avec
l’expression d’une volonté de durcissement puisque parmi les partisans de
l’application stricte de la peine à perpétuité, 64% sont en même favorables au
développement de mesures hors de la prison.
Ces positions sur l’application des peines (application stricte de la perpétuité – alternative à la prison) varient en fonction des types d’infraction. Les actes cités comme n’étant pas assez sévèrement punis sont principalement les actes à caractère sexuel, alors que ceux cités comme étant trop punis sont les vols et les actes de petite délinquance.
Pour aller plus loin
Exposition à Lyon : Prison, au-delà des murs
Jusqu’au 26 juillet 2020
Quelle est la réalité des prisons aujourd’hui ? L’exposition vous propose une réflexion sur notre système pénitentiaire hérité du 18e siècle. Conçue de manière immersive, elle explicite, par le biais de récits d’anciens détenus mais aussi de représentations de notre imaginaire collectif, le paradoxe selon lequel la prison isole l’individu pour le punir et protéger la société, tout en visant à sa réinsertion. Un parcours parallèle vous invite à explorer, par le théâtre, le quotidien des détenus.
Musée des Confluences 86 quai Perrache, 69002 Lyon – France (+33) 04 28 38 12 12
du mardi au vendredi de 11h à 19h samedi et dimanche de 10h à 19h jeudi nocturne jusqu’à 22h
La Fondation Après-Tout est placée sous l'égide de la Fondation de France
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