La Fondation Après-Tout est heureuse de vous donner rendez-vous à Dieulefit, dans la Drôme, pour la 2ème édition des Rencontres estivales d’une durée de trois jours autour des enfermements (prison, rétention administrative, garde-à-vue, hospitalisation psychiatrique sous contrainte…).
Evasions ! constitue le thème de la deuxième édition de Concertina et se tient les 1er-3 juillet 2022.
Aider les professionnels au service de l’humainmaintenant et dans la durée
Depuis douze ans, la Fondation
Après-Tout s’est donnée pour raison d’être d’accompagner les professionnels au
service de l’humain, c’est-à-dire les professionnels de la santé, du social, du
pénitentiaire et du judiciaire.
Aujourd’hui, ces professionnels
vivent des moments extrêmement difficiles, stressants, fatigants, engageants.
Souvent, ils doivent faire face à des situations inédites, auxquelles ils sont
parfois peu ou mal préparés.
Dans le contexte de pandémie qui
est le nôtre aujourd’hui, la Fondation Après-Tout a décidé d’engager, pour
maintenant mais aussi pour demain, des moyens importants dans l’accompagnement de
ces professionnels. Cet engagement se concrétise par le soutien financier de
projets visant à écouter, assister, aider sur un plan psychologique les
soignants, les acteurs du médico-social, tous les professionnels du
pénitentiaire et du judiciaire, qui peuvent être durablement meurtris par les
événements qu’ils vivent aujourd’hui.
Ainsi, la Fondation Après-Tout est à l’écoute de tous les projets qui vont dans cette direction. Les associations ou celles et ceux qui œuvrent dans cette perspective peuvent nous contacter dès maintenant :
Depuis douze ans aussi, la
Fondation Après-Tout essaye d’apporter sa contribution à l’éclosion d’une
société plus humaine.
La pandémie à laquelle notre
société doit faire face est un extraordinaire révélateur de nos faiblesses, de
nos vulnérabilités, de nos fragilités. Elle créée la nécessité de nous
interroger sur l’après. Elle ouvre la voie à une nécessaire réflexion sur la
société que nous voulons pour demain.
Une société dont les priorités
seraient réorientées !
Dans cet esprit, la Fondation Après-Tout
souhaite être un acteur de ces réflexions en soutenant des initiatives qui
pourraient aider à une réflexion éthique et en apportant, au travers de
conférences et de débats, que nous pourrons organiser après le déconfinement,
sa pierre à l’édifice.
Si vous avez des idées, contactez-nous dès maintenant :
Vous le savez, la Fondation Après-Tout attache une attention particulière à la limitation de ses frais de fonctionnement. Ainsi, les sommes que la Fondation recevra dans les mois qui viennent seront exclusivement et intégralement dédiées à ces actions.
La question de la surpopulation carcérale traditionnellement soulevée en France, vécue comme une fatalité vient de vivre une évolution surprenante.
Pensez-donc : le 9 Avril la Garde des Sceaux [1] a pu annoncer que les prisons ne comptaient plus que 61.100 détenus soit 11.500 de moins qu’un mois avant ! Et ce nouveau chiffrage est égal au nombre de places théoriquement disponible. Du jamais vu depuis bien longtemps !
Ce désengorgement aura permis, déjà, du moins à ce jour, de
contribuer à éviter une diffusion incontrôlée de la pandémie au sein du milieu
carcéral, avec – il faut le rappeler malheureusement – la décision de suppression provisoire des
parloirs.
Alors comment un tel résultat a-t-il pu être obtenu ? Plusieurs facteurs ont joué et l’article du quotidien LE MONDE du 29 avril 2020 : « Cette crise nous apprend que la surpopulation carcérale n’est pas une fatalité » : 11 500 détenus de moins en six semaines… et après ? y revient : des mesures volontaristes prises par le Ministère de la Justice favorisant la sortie anticipée de détenus arrivés en fin de peine, un ralentissement de l’activité des juridictions lié aux suites de la crise sanitaire en cours, de même qu’une baisse importante des actes de délinquance du fait des mesures de confinement.
Comme on le voit dans l’article du MONDE, si cet évènement est salué par différents partenaires [2] et responsables, et s’ils s’accordent à souhaiter qu’il ne soit pas éphémère, les positions sont diverses quant à la probabilité de le voir se confirmer dans le temps, et notamment à l’issue du déconfinement, et sur les moyens d’y parvenir.
France Stratégie est une institution autonome placée auprès du Premier ministre et contribuant, par ses propositions, à l’action publique et éclaire le débat.
Elle réalise des études originales sur les grandes évolutions économiques et sociales, et les enjeux de soutenabilité.
Elle produit également des évaluations de politiques publiques à la demande du gouvernement.
La synthèse ci-dessous a été élaborée par Alain Chalochet
Présentation
À la
mi-mars 2020, l’épidémie de Covid-19 a imposé un arrêt partiel ou total
d’activités jugées « non essentielles », quand d’autres ont été mobilisées face
à l’urgence.
Au-delà de
sa dimension économique, la crise actuelle affecte les conditions de vie et les
conditions de travail, renforçant des vulnérabilités existantes et en générant
de nouvelles.
La note d’analyse, élaborée à partir de l’étude menée par France-Stratégie[i], propose une typologie inédite des « métiers dans la crise » en cinq groupes :
Les métiers qualifiés de « vulnérables de toujours » conjuguent difficulté à travailler à distance et statuts souvent précaires (1 sur 5 en CDD ou en intérim). Ce sont plus de 4 millions de travailleurs, surtout des hommes, artisans et ouvriers de l’industrie et du bâtiment, traditionnellement confrontés à des conditions de vie et de travail difficiles.
Les « nouveaux vulnérables » (4,3 millions) affrontent une crise inédite liée à l’exercice même d’un métier en contact avec le public. Leurs activités sont ralenties, voire interdites, et leur statut les fragilise (31 % de contrats intermittents ou d’indépendants en solo). Pour certains, dans les transports, l’hôtellerie-restauration, les services aux particuliers, l’art, la culture, le sport, la vulnérabilité financière se double d’une incertitude sur l’avenir.
Les 10 millions de professionnels directement ou indirectement sur le « front » : des activités apparaissent tout à coup essentielles dans cette crise (les métiers de la santé, de l’éducation, de la propreté, de l’alimentaire et de sa distribution, et les professions régaliennes). Peu fragilisés économiquement, mais exposés à une vulnérabilité sanitaire par leur contact direct avec le public pour le plus grand nombre. Parmi les plus mal rémunérées, largement occupées par des femmes, ces professions sont exposées à une intensification du travail.
Les télétravailleurs sont exposés à un nouveau risque d’hyperconnectivité (près de 4 millions d’emplois). Avant tout des cadres, ils assurent, à distance, la continuité du travail et préparent la reprise d’activité. Ils voient leur charge mentale et les difficultés de conciliation avec la vie familiale renforcées par la crise.
Enfin, des professions intermédiaires ou d’employés qualifiés (4 millions), souvent en inactivité partielle, sont protégés du licenciement à court terme par leur statut. Mais leur difficulté à télétravailler les expose à des risques d’éloignement de la sphère professionnelle et de désocialisation.
INTRODUCTION
L’étude ne cherche pas à quantifier
le nombre d’emplois perdus, de burn-out, d’impayés, d’inégalités. Mais à
éclairer les vulnérabilités de ceux que la crise sanitaire et le confinement ont
contraint à cesser, ralentir ou poursuivre leur activité. La courbe du
ralentissement des activités est imprécise, mais les risques auxquels ils sont
confrontés le sont moins, car ils étaient là avant le confinement et l’ampleur
du choc va les aggraver.
Plusieurs lignes de fracture
apparaissent.
D’abord
entre ceux qui risquent de cesser de travailler parce que leur activité est
fermée, leur contrat interrompu, leur trésorerie trop faible, et qu’ils ne
peuvent exercer leur profession depuis leur domicile, et ceux qui continuent de travailler à domicile ou en présentiel.
Si pour les premiers,
le risque économique est majeur, c’est pour les seconds les conditions de vie
et de travail qui sont rendues plus difficiles par le confinement, avec la
professionnalisation de leur sphère privée, parce qu’ils sont susceptibles de
risques psychosociaux, que la crise accentue, ou à des risques sanitaires
inédits.
Ensuite
entre ceux dont les conditions de vie sont rendues difficiles, par la charge
de leurs enfants, l’exiguïté de leurs logements, leur situation de handicap ou
leur situation financière fragile, et ceux
qui ont des conditions d’existence plus favorables. La vulnérabilité des conditions
de vie affecte ceux qui travaillent à leur domicile et est source de fragilité
pour ceux qui continuent d’exercer leur profession à l’extérieur et pour ceux
contraints à l’inactivité.
Enfin, parmi celles qui travaillent encore, les
professions exposées à des conditions de
travail difficiles, en contact direct avec le public et soumises à des horaires
atypiques, à des postures physiques pénibles et à des risques psychosociaux, et
celles
qui en sont prémunies.
Comment se précise ensuite une
cartographie des vulnérabilités ? L’étude tente de définir des indicateurs de vulnérabilité
économique, en conditions de vie et en conditions de travail pour chaque métier
en opérant un croisement entre ces dimensions.
LES VULNÉRABILITÉS ÉCONOMIQUES, EN CONDITIONS DE VIE ET EN CONDITIONS DE TRAVAIL, SE COMBINENT DIFFÉREMMENT SELON LES MÉTIERS
Si le
ralentissement est général, il n’affecte pas tous les métiers de la même
manière. L’arrêt plus ou moins étendu des activités se double de fragilités
statutaires et professionnelles. Pour prendre en compte ces dimensions, les
auteurs ont construit un indicateur de vulnérabilité économique de chaque
métier fondé sur l’exposition au risque économique des secteurs d’activité
concernés, la proportion de professionnels dans l’impossibilité de travailler à
domicile, la fragilité des statuts des professionnels.
Une vulnérabilité économique
marquée : statuts précaires, métiers exposés au risque d’arrêt d’activité
Les métiers les plus vulnérables au risque économique cumulent souvent
une forte exposition à la cessation d’activité
et une fragilité statutaire. Leur activité a été interrompue du fait de la dangerosité
des rassemblements qu’ils impliquent, leurs contrats de travail sont souvent
intermittents ou ils sont nombreux à exercer en indépendants, en autoentrepreneur.
Ils ne peuvent pas exercer leur profession de leur domicile. Exemples :
coiffeurs et esthéticiens, professionnels des arts et spectacles, marins, pêcheurs,
employés de l’hôtellerie-restauration.
Les ouvriers de l’industrie vivent un ralentissement de l’activité et un
fort risque de rupture d’approvisionnement, alors que leurs contrats, souvent à
durée limitée, fragilisent leur emploi. Les employés de l’informatique et les
ouvriers de la manutention sont moins exposés à la cessation d’activité mais ont une très
grande fragilité statutaire.
Les employés de maison ont, à l’inverse, une très forte exposition
sectorielle et une moindre fragilité statutaire.
Les métiers les moins vulnérables économiquement, professions
médicosociales, de la fonction publique, de la banque-assurance. Mais certaines
professions très préservées du risque économique ne travaillent pas
nécessairement dans des activités essentielles : les cadres commerciaux,
administratifs, peuvent exercer à domicile en télétravail, et sont protégés par
des CDI.
A contrario, certaines professions
sur le devant de la scène, caissiers, commerçants, agriculteurs ou maraîchers
ne sont pas parmi les moins vulnérables, parce que soumises aux aléas des
fermetures des commerces ou restaurants, ou du fait de statuts précaires.
Le travail des femmesrendu visible par la crise
La crise rend visibles des métiers souvent mal considérés situés dans une
sphère sociale (hôpitaux, justice, écoles, services d’assistance) soutenue par
l’Etat-providence ; elle met également en lumière le travail des femmes,
qui sont surreprésentées chez les enseignants, infirmiers et sages-femmes,
aides-soignants, aides à domicile et assistantes maternelles, ou encore parmi
les professionnels de l’action sociale. Elles sont aussi majoritaires dans des
métiers d’employés et dans la sphère publique, mobilisés en cette période de
crise et appelés à être en contact avec la population. Cette interaction sociale
directe les expose au risque sanitaire.
Par ailleurs, certains de ces
métiers ont en commun d’être peu rémunérés au regard de l’ensemble des salariés
(salaire médian situé en dessous de celui de l’ensemble des salariés à temps
complet : 1 800€ net/mois), d’où un sentiment d’absence de reconnaissance
dans le travail. Exemples : aides-soignants, agents d’entretien,…. Les agriculteurs,
les maraîchers et les métiers de bouche, composés d’hommes, affichent un niveau
de rémunération également inférieur au salaire médian.
Une vulnérabilité de conditions de
vie : familles – surtout monoparentales ‑ en 1ère ligne
Trois types
de vulnérabilité sont abordés en conditions de vie :
vulnérabilité
de conciliation vie familiale et vie professionnelle, pour les familles
vivant en appartement dans les grandes villes
vulnérabilité
financière pour les métiers à faibles revenus avec charges de loyer ou emprunts
vulnérabilité
spécifique pour les personnes en situation de handicap.
Une vraie difficulté avec le travail en période de confinement :
il faut s’occuper des enfants, assurer la continuité pédagogique avec
l’Éducation nationale si on reste à la maison ou trouver un mode de garde si on
travaille en présentiel. Toutes choses encore plus difficiles pour les familles
monoparentales. Et on retrouve là les métiers féminins mal rémunérés sur le
front du Covid-19 (aides-soignants, aide à domicile, caissiers, agents
d’entretien).
En général, les métiers qui s’exercent surtout en présentiel sont mal
rémunérés et la garde d’enfants redouble les inquiétudes financières en cas de
d’arrêt ou de menace sur leurs activités.
Deux contraintes pour ceux qui poursuivent leur activité à domicile :
la garde des enfants et la nature de leur logement (le type et le lieu d’habitation
par rapport au travail).
Télétravailler confiné est plus difficile pour ceux qui vivent dans un
appartement plus exigu de grande ville, et qui ont la charge d’enfant quand
l’activité scolaire est suspendue.
Les concernés sont souvent des
cadres, moins exposés au risque économique, mais soumis à l’impératif de conciliation
entre vie familiale/vie professionnelle, et exposés à une intensité de travail,
une hyperconnectivité et une charge mentale accentuées par le confinement.
Autre source de vulnérabilité,
des contraintes financières différentes selon que l’on est propriétaire ou
locataire (ou accédant à la propriété). De même, le niveau de rémunération initial
renforce la vulnérabilité financière, puisqu’elle sert de salaire de référence
pour le chômage partiel. Ceux-là exercent des métiers d’ouvriers et d’employés,
souvent des métiers jeunes (militaires, policiers, pompiers, vendeurs ou
serveurs, ouvriers peu qualifiés.
Cette contrainte financière est évidemment redoublée pour les métiers
très affectés par l’arrêt ou le ralentissement de l’activité, dans la
restauration, l’industrie et les transports.
Enfin, les situations de handicap renforcent les contraintes, que les
personnes puissent travailler à leur domicile, avec un emploi en présentiel ou
en arrêt temporaire de leur activité. Or, les professions sont très inégales face
aux risques de santé invalidants qui touchent davantage les ouvriers que les
cols blancs.
La vulnérabilité des métiers au
prisme des conditions de travail
Cette crise renforce-t-elle des situations préexistantes ou
constitue-t-elle un temps d’arrêt ?
Trois grandes dimensions ressortent quant aux conditions de
travail :
L’intensité de la charge mentale, avec le
travail sous pression, l’absence de reconnaissance
L’intensité de la pression temporelle, les
contraintes de rythme
Les contraintes et risques physiques, postures
pénibles, port de charges lourdes ou exposition à un bruit intense. Ainsi que le
type d’horaires : week-end, soir ou nuit.
Des contraintes de travail difficiles pour celles et ceux mobilisés
durant la crise
Les métiers fortement mobilisés
dans la crise sont souvent soumis à des conditions de travail difficiles. Infirmiers
et sages-femmes, aides-soignants, métiers régaliens, professions de l’action
sociale cumulent ainsi charge mentale et pression temporelle. Ils sont souvent directement
en prise avec la crise sanitaire, et l’intensité du travail s’en trouve
accentuée. Ils sont aussi soumis souvent à des horaires atypiques : gardes des
personnels de santé, agents d’entretien en horaires décalés.
D’autres professions font fonctionner des commerces alimentaires, les
caissiers ou gérants de petit commerce, qui travaillent souvent le week-end et
en soirée. Au total, pour ces métiers, la situation actuelle peut accroître la
vulnérabilité ; au surplus, les dispositions prises récemment rendent possible
d’augmenter le temps de travail.
Les métiers de bouche et les métiers agricoles qui pourvoient aux besoins
de première nécessité sont exposés à des contraintes physiques importantes.
Les professionnels de l’hôtellerie-restauration
qui travaillent en horaires atypiques (week-end, soir et nuit) et sont en contact
direct avec la population, seront parmi les professions les plus à risque au
moment du déconfinement, tout comme les coiffeurs et les esthéticiens.
QUELLES VULNÉRABILITÉS POUR QUELS MÉTIERS ?
Les vulnérables de toujours : les métiers ouvriers ou artisanaux déjà
fragilisés sont très exposés économiquement dans la crise
Les ouvriers de l’industrie et du bâtiment, les marins, pêcheurs, aquaculteurs,
les employés administratifs d’entreprise et les personnels de ménage, sont
confrontés à un risque élevé de chômage dans la crise sanitaire (quoique
bénéficiaires du dispositif de « chômage partiel »). Ils ont en commun une vulnérabilité
économique d’hier et d’aujourd’hui, liée à plusieurs facteurs. Des statuts plus précaires que pour la moyenne des emplois
(près d’un sur cinq exerce en CDD ou en intérim). Une activité cyclique qui pâtit
du ralentissement de leurs secteurs d’emploi. S’y ajoute l’impossibilité de
travailler à domicile. Ils partagent encore une fragilité financière, avec des
salaires médians inférieurs à la moyenne. Mais la fragilité est aussi d’ordre physique
et psychologique, liée à leurs conditions de vie et de travail habituelles : 53
% d’entre eux présentent des risques physiques et 40 % sont soumis à des
rythmes de travail intenses (contre 29 % et 37 % en moyenne).
Quant aux conditions de vie, ceux qui exercent ces métiers résident
moins souvent en appartement, car leurs activités sont moins concentrées dans
les grandes villes. Les professions les plus féminisées, textile, ouvriers peu qualifiés des
industries de process, personnels de ménage, agents administratifs d’entreprise
comptent plus de familles monoparentales. La charge des enfants devient d’autant
plus compliquée que l’emploi est mis en péril ou que le chômage partiel diminue
des revenus faibles.
Les contraintes et risques physiques
auxquels sont exposées ces ouvriers, artisans, pêcheurs, … ont déjà entraîné un
handicap reconnu pour une partie d’entre eux. Tous sont soumis en temps normal
à des rythmes de travail contraints. Certains travaillent en horaires
atypiques, pour répondre aux besoins ininterrompus. La charge mentale liée à la
crainte de perdre son emploi et à l’absence de reconnaissance est très présente
dans certains de ces métiers qui cumulent vulnérabilités physiques, psycho-sociales
et de conditions de vie ajoutées à un fort risque économique.
Les nouveaux vulnérables : les transports, la restauration, les services
aux particuliers et la culture.
Les professions des transports et de l’entreposage, de l’hôtellerie-restauration,
des services aux particuliers (coiffeurs, esthéticiens, …) et les
professionnels des arts, spectacles, de la culture et du sport, dont l’emploi
avait bien résisté, voire progressé ces dernières années, sont confrontés à une
crise économique historique. Des métiers au contact de la population (4,3
millions d’emplois), très exposés au ralentissement ou à l’arrêt de leur activité.
S’ils bénéficient du dispositif de « chômage partiel », leurs statuts les
fragilisent : les contrats non permanents sont pour 20 % en moyenne de ces
professions.
Comme les métiers « vulnérables
de toujours », ils sont confrontés à des difficultés financières, avec un salaire médian de 1 550 euros mensuels,
le plus faible de toutes les catégories de profession examinés. Ils sont en
horaires atypiques : la moitié travaillent le week-end, contre 40 % des actifs.
Leur vulnérabilité individuelle peut affecter leur capacité de rebond, et les
indépendants en solo sont nombreux : coiffeurs, esthéticiens, employés des
services divers, patrons et cadres d’hôtels, cafés, restaurants, professionnels
des arts et spectacles.
Les métiers de la manutention partagent avec les autres ouvriers une
exposition aux risques physiques : ces risques occasionnent parfois des invalidités
professionnelles, et on relève une reconnaissance de handicap supérieure à la
moyenne des métiers.
Les professions féminisées (ouvriers peu qualifiés de la manutention,
cuisiniers, serveurs, coiffeurs et esthéticiens) présentent une plus forte
occurrence de familles monoparentales. Ce sont également des métiers souvent soumis
à des horaires atypiques et à une forte intensité du travail.
Plus exposés aux risques
physiques, et plus vulnérables financièrement et en conditions de vie, ces métiers
risquent de pâtir de la crise au-delà du confinement, malgré les mesures de
soutien déployées, qu’il s’agisse du chômage partiel ou du fonds de solidarité
pour les indépendants.
Les métiers « au front » dans la crise, entre risque sanitaire et
intensification du travail
Les professions dont l’activité est maintenue, non soumises à
fermeture ou jugées essentielles, sont en première ligne pour répondre à
l’urgence sanitaire, aux besoins de première nécessité ou pour assurer les
services publics. Ils sont 10,4 millions, peu vulnérables économiquement,
exerçant les métiers de soins, d’éducation et de la propreté, les métiers
régaliens (armée, police, pompiers), de la relation usager des services
essentiels (caissiers, employés de la fonction publique) ou de
l’agroalimentaire. Ces métiers en contact direct avec le public sont souvent
soumis à un risque infectieux. Certains sont très exposés durant le confinement
(soin, propreté, vente alimentaire), quand d’autres, dont l’activité est
actuellement ralentie à distance, le seront avec le déconfinement (vente non
alimentaire, enseignement, garde d’enfants, etc.). Cette singularité professionnelle
risque d’aggraver des conditions de travail déjà jugées difficiles par certains
professionnels, avec plus d’horaires atypiques que la moyenne et une charge
mentale forte. Dans ces métiers féminins à 65 %, les parents isolés sont
nombreux, d’où des difficultés à concilier la garde des enfants et un rythme de
travail intense. Hormis les médecins, enseignants et métiers régaliens, ils ont
en commun d’être rémunérés à un niveau proche ou inférieur au salaire médian (1
626 euros mensuels en moyenne).
Les métiers de soins et de la propreté (aides à domicile, assistantes
maternelles et agents d’entretien) sont d’ores et déjà aux avant-postes pour
gérer la crise sanitaire.
Chez les professionnels de santé
(médecins, infirmiers et sages-femmes, aides-soignants, professions paramédicales),
la charge mentale et la pression temporelle dues notamment à la réorganisation
des services et à l’afflux de patients sont susceptibles de dégrader les
conditions de travail à court terme. Ils travaillent plus fréquemment le
week-end, le soir ou la nuit et sont davantage salariés en CDI ou exercent en libéral.
Ces professions très féminisées sont davantage exercées par un parent isolé.
Les métiers régaliens (armée, police et pompiers) sont prémunis du risque de
perte d’emploi.
La crise actuelle expose également
les métiers de la relation usager (catégorie C de la fonction publique,
employés de services publics, professionnels de l’action sociale) ou de la
relation commerciale (caissiers, employés de libre-service, vendeurs, gérants
commerciaux). Ces professionnels sont pour partie déjà en contact avec le
public ou le seront après le déconfinement.
Par ailleurs, malgré la fermeture de leur lieu de travail, les professionnels
de l’enseignement et de la formation ont pu mettre en place des modes
d’organisation du travail alternatifs pour assurer la continuité de leur
activité. Le corps enseignant a adapté sa pratique pédagogique grâce à des
dispositifs d’apprentissage à distance. Variable selon les établissements, cette
évolution présente un risque d’accentuation des inégalités éducatives, et une
difficulté supplémentaire pour les enseignants à la reprise des cours. La
réouverture encadrée des écoles est susceptible de les rendre plus vulnérables
au risque sanitaire. Ce même pour les assistantes maternelles dont l’activité a
été ralentie.
Enfin, d’autres professionnels, qui n’ont pas été directement exposés
au Covid-19 et qui ne le seront pas davantage avec le déconfinement, ont
cependant vu leur travail s’intensifier pour répondre aux besoins de première nécessité.
C’est le cas des métiers agricoles ou des métiers de bouche.
Des métiers de cadres confrontés à l’hyperconnectivité et à
l’intensification du travail
En période de confinement, les cadres sont exposés à un risque
économique faible : leur capacité à travailler à distance en mobilisant les
outils numériques, et leur statut d’emploi leur permettent de continuer
d’assurer leurs responsabilités professionnelles. Le télétravail des cadres
peut être subi et, en ce sens, occasionner une réorganisation du travail. Les
cadres peuvent être sollicités pour adapter l’organisation de l’entreprise aux
mesures de confinement et faciliter ainsi la reprise d’activité : mise en place
du télétravail, communication interne, mesures de sécurité et d’hygiène, etc.
Ils sont un maillon intermédiaire dans l’organisation, dont le rôle est de
déployer la stratégie de l’entreprise auprès de leurs équipes. Les cadres de
l’industrie et du commerce préparent aujourd’hui les modalités de la reprise
d’activité.
La difficulté d’organiser cet effort collectif à distance et la tendance
à l’hyperconnectivité pour répondre aux urgences exposent les cadres à une dégradation
de leurs conditions de travail, aggravée par la difficulté à concilier vie
familiale et vie professionnelle. Or ces métiers ont déjà les plus fortes
intensités de travail et de charge mentale en France.
Leur vulnérabilité pourrait
s’accroître dans les prochains mois, compte tenu des difficultés économiques de
leurs secteurs d’emploi. Ils seront en première ligne pour répondre aux
incertitudes générées par la crise, et certains sont dans des secteurs
d’activité très sensibles aux cycles. Si leur vulnérabilité est atténuée par
leur statut et leur capacité à travailler à distance, les incertitudes sur le
contexte économique en sortie de confinement font craindre à plus long terme
pour leur emploi (bâtiment et travaux publics, ingénieurs, cadres de
l’industrie).
Des métiers économiquement préservés mais parfois contraints à
l’inactivité partielle
Certaines professions intermédiaires ou métiers d’employés qualifiés
ne se retrouvent pas dans les groupes précédents. Ils ont un risque faible ou
modéré de perte d’emploi, qu’ils soient en partie mobilisés dans la crise (professions
intermédiaires de la fonction publique, employés et techniciens de banque et assurances),
sont souvent en CDI, et protégés d’un licenciement à court terme.
Métiers jeunes de début de carrière, leur salaire médian est
légèrement au-dessus du celui de l’ensemble des professions et ils travaillent
moins à distance que les cadres, ce qui les contraint à l’inactivité. Exerçant
des fonctions support ou de management intermédiaire, ils sont dépendants de
leurs collectifs de travail. La dispersion de ces collectifs pendant le
confinement porte en elle des risques d’éloignement de la sphère
professionnelle et de désocialisation.
La reprise d’activité pourra être rendue moins aisée par
l’autonomisation des collectifs de travail qui pourra nécessiter une adaptation
des formes de soutien et d’encadrement. Le travail à distance et la
mobilisation d’outils numériques pendant le confinement pourraient également
imposer une mise à niveau des compétences numériques de ces métiers.
Ces catégories supportent des
hétérogénéités au sein de chaque métier ; mais elles présentent des dominantes claires : les « vulnérables de
toujours » et les « nouveaux vulnérables » totalisent 8,5 millions de personnes
(32 % de l’emploi) et coïncident largement avec les salariés en chômage partiel
(11,3 millions au 28 avril). En sortie de confinement, les premiers pourront
reprendre leur activité mais seront exposés au risque de licenciement (difficulté
de leur entreprise) ; la reprise d’activité des seconds sera durablement
ralentie par les risques sanitaires accentuant leur fragilité économique.
La troisième catégorie, avec 10,4
millions de personnes et 39 % de l’emploi, regroupe l’essentiel des personnes qui
travaillent encore en présentiel, mais pas uniquement (elle inclut les
enseignants). Enfin, les deux dernières catégories regroupent beaucoup des
personnes actuellement en télétravail.
CONCLUSION
La sortie du confinement et la transition, parfois longue, vers une
reprise d’activité totale ou partielle, n’ont pas la même signification pour
tous les métiers. Sans préjuger des décisions que prendront les branches
professionnelles et les partenaires sociaux, ni des mesures en place ou qui
seront prolongées pour préserver l’emploi des plus vulnérables, il est
nécessaire d’attirer l’attention sur un traitement « différencié » des risques
auxquels sont confrontés les métiers.
Certains professionnels ont besoin à la fois de prévenir leur
vulnérabilité économique et financière, d’autres sont en risque d’inadaptation
des compétences ou de désocialisation, d’autres encore sont vulnérables aux
plans sanitaire et psychique. Le burn-out peut toucher des professions très
qualifiées et très peu qualifiées qui ont affronté la crise sanitaire en
présentiel au contact de l’épidémie ou à distance pour en gérer les conséquences
et la reprise de l’activité.
Au-delà, il se pourrait que les
mesures de confinement accélèrent des transformations organisationnelles et la
diffusion de technologies numériques ; et des adaptations pour tenir
compte des innovations, pour repositionner les tâches et les hiérarchies
bouleversées par la distanciation sociale pourraient devenir nécessaires. La
récurrence vraisemblable de crises majeures
de ce type imposera également des mesures durables d’hygiène et de sécurité
qui transformeront les collectifs de travail et pourraient imposer de nouveaux
modes de collaboration et d’organisation du travail.
Lors de l’audioconférence réunissant les représentants des cultes en France avec Emmanuel Macron le 23 mars 2020, l’idée de mettre en place « des plateformes téléphoniques d’écoutes psychologiques et spirituelles » a été accueillie favorablement au sommet de l’Etat. Mais l’exécutif craignait que la mise en place d’un nouveau numéro vert dédié à l’accompagnement spirituel puisse impacter la visibilité du numéro national d’information (le 0 800 130 000).
Aussi l’Etat a décidé d’intégrer dans les services du numéro national la possibilité pour chaque personne d’être redirigée vers une plateforme gérée par le culte de son choix dès lors qu’elle existe. Cela n’empêche pas pour autant chaque religion de communiquer une ligne directe auprès de leurs fidèles tant qu’elle ne se substitue pas au numéro national pour des informations d’ordre générale liées au Covid-19.
Ainsi, à ce jour, six cultes ont lancé leur plate-forme :
et plus précisément :
L’ensemble des associations juives a mis en place une plateforme d’écoute téléphonique gratuite pour les professionnels et le public. Cette plateforme est complémentaire des initiatives qui existent à l’échelle nationale.
Face à la crise sanitaire causée par l’épidémie du Covid-19 en France, le Conseil français du culte musulman (CFCM) a lancé, dès le lundi 30 mars, une permanence téléphonique accessible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 afin de permettre aux malades du coronavirus et à leurs proches de confession musulmane de bénéficier d’une assistance psychologique et spirituelle, avec le concours étroit de l’aumônerie musulmane hospitalière. Tel : 01 45 23 81 39 (Ligne directe) Mail de contact : cfcm.covid19@gmail.com
L’Eglise catholique, quant à elle, a mis en place une ligne spéciale, réservée aux malades du coronavirus et à leurs proches pour pouvoir bénéficier d’une écoute attentive et d’une assistance psychologique et spirituelle. Les plages horaires vont de 8h à 22h, sept jours sur sept.
Les numéros verts habituels au service de la population pour des situations d’urgence restent toujours actifs et utilisables sept jours sur sept.
Ainsi, si l’Education nationale assure des cours à l’intérieur de la prison, des cours sont aussi dispensés par deux associations : AUXILIA et le GENEPI.
AUXILIA donne des cours par correspondance, mais aussi sur place. Une trentaine de personnes bénéficient des cours, en individuel ou en petit groupe ; une soixantaine de personnes bénéficient des cours par correspondance. Les niveaux sont très variés : de l’illettrisme à la préparation d’examens.
Le joli nom de GENEPI a été choisi pour sa symbolique : petite fleur qui pousse en milieu hostile. C’est aussi un sigle : groupement étudiant national d’enseignement pour les personnes incarcérées. Le GENEPI donne des cours de tous niveaux. Il anime des activités socioculturelles : arts plastiques, musique, ciné-débat. Il est investi également dans l’information et la sensibilisation du public, et notamment en collèges et lycées. Le GENEPI mène une réflexion permanente sur le système pénal et judiciaire.
Les besoins culturels sont aussi assurés par l’ASSEMALC (association socio-éducative de la Maison d’Arrêt de Lyon Corbas). Elle anime et co-finance des activités gérées par ses propres bénévoles : ateliers d’informatique, écrivain public, activités de couture, tricot, dessin, contes. Elle co-anime et co-finance des activités gérées par le SPIP : bibliothèques, canal vidéo interne, et aussi des manifestations de musique, théâtre, concerts, expressions corporelles. Elle a organisé le concours de dessins et poésies.
La CROIX ROUGE qui a de vastes champs d’intervention, nationalement et internationalement, a le souci de l’amélioration des conditions de détention, en particulier des plus démunies. Elle participe aux actions de l’association socio-éducative. Elle peut proposer aussi des actions qui lui sont spécifiques, comme une formation aux premiers secours, ou des prises en charge financières ponctuelles
Les personnes détenues peuvent être aussi des parents… Pour certains, leurs enfants viennent les voir dans le cadre du parloir familles, avec l’autre parent. Pour d’autres, la situation est plus délicate : situation de conflit entre les parents, divorce, enfants placés, par exemple. Le REP, relais enfants-parents, accompagne des enfants qui viennent voir leur père ou leur mère incarcérée, pour permettre que cette visite puisse se faire et se faire dans de bonnes conditions pour l’enfant et son parent. Le REP prend l’enfant en charge dans son lieu de vie, l’accompagne à la prison, est présent durant la visite, et réaccompagne l’enfant dans son lieu de vie.
Parmi les personnes détenues, un certain nombre sont de nationalité étrangère. La CIMADE, mouvement de solidarité avec les étrangers, pour la défense de leurs droits, les rencontre. Celles-ci, en effet, ont des problèmes particuliers, en tant qu’étrangers : renouvellement de leur titre de séjour, si elles étaient en situation régulière ; recours éventuels contre des mesures de renvoi : une personne en situation régulière peut faire l’objet d’une mesure de renvoi, en plus de sa peine de prison ; c’est ce qu’on a appelé la double peine.
Sont en prison aussi des personnes « sans papier »…c’est à dire sans titre de séjour, et en général, sans papier non plus de leur pays d’origine. Elles peuvent être en France depuis de nombreuses années, ou venir seulement d’arriver.
Certaines personnes étrangères sont incarcérées, en effet, pour des délits n’ayant trait qu’au droit au séjour : (absence de titre de séjour, cumulée avec une absence de document d’identité, ou bien utilisation de faux passeport, ou faux titre de séjour).
Pour les unes comme pour les autres, il s’agit, au regard de la situation précise de la personne, de l’informer des droits qu’elle a, ou n’a pas, de rester sur le territoire français, et de l’aider dans les démarches juridiques qu’elle souhaite faire ; renouvellement de titre, recours contre des mesures de renvoi, demande d’asile, ou aide au retour dans son pays….
Les personnes détenues le sont pour un temps donné. Des associations se préoccupent plus précisément de leur sortie.
Ainsi, COMPANIO rencontre les personnes détenues dans les deux mois qui précèdent leur sortie, afin de leur proposer un soutien et un accompagnement, dans les efforts qu’elles auront à faire pour trouver ou retrouver une place dans la société. Il s’agit d’un accompagnement individuel, sans limitation de durée, destiné à venir en aide aux personnes quand elles sortent de prison. Dans les difficultés qu’elles rencontrent alors (logement, travail, santé etc.) COMPANIO joue un rôle d’interface entre la personne accompagnée et les divers partenaires susceptibles de se mobiliser.
La FNARS intervient pour la sortie. Elle est une fédération qui regroupe notamment tous les CHRS (centre d’hébergement et de réadaptation sociale) qui ont vocation à aider à la réinsertion des personnes en difficulté sociale. Dès leur origine, les CHRS ont accueilli des sortants de prison. Ils accueillent aussi des personnes en aménagement de peine : PSE (placement sous surveillance électronique) et des personnes en placement extérieur.
Durant le temps de l’incarcération, les personnes détenues ont besoin de relations, d’échanges, pour vivre leur quotidien et préparer l’après prison. L’ANVP, association nationale des visiteurs de prison, contribue à répondre à ce besoin. 45 visiteurs, à Corbas, rencontrent régulièrement, chacun, en moyenne, 2 personnes détenues, à leur demande. Ces rencontres n’ont pas d’autre but, que d’être une rencontre. Une possibilité pour la personne détenue de pourvoir parler, être écoutée, faire des projets, avoir une relation suivie avec quelqu’un du dehors et maintenir ainsi un lien social.
Ce maintien de liens se fait aussi par courrier, avec le SECOURS CATHOLIQUE. Une de ses activités s’intitule en effet « amitié courrier » : une cinquantaine de bénévoles correspond régulièrement avec une centaine de personnes détenues.
Le SECOURS CATHOLIQUE apporte aussi un soutien financier, par le biais de la commission indigence. Ainsi, 80 à 90 personnes détenues, sans ressources, reçoivent 25 euros par mois. Cela leur permet d’avoir un minimum pour cantiner, des produits d’hygiène, ou alimentaires ou vestimentaires, sans subir les pressions d’autres personnes détenues.
Sont aussi membres du GLCP, les aumôneries qui assurent un rôle important, non seulement au niveau de la pratique religieuse, mais aussi dans le besoin de relations des personnes détenues.
Les aumôneries
Les Aumôneries : quatre aumôneries interviennent à Corbas, catholique, protestante, musulmane et israélite, sachant que pour cette dernière il y a un rabbin référent, qui vient au parloir avocat sur rendez-vous. L’aumônerie musulmane est assurée régulièrement chez les femmes par une aumônière. Un imam vient chez les hommes, mais pour le moment, il y a un déficit de présence par rapport aux besoins. Pour les aumôneries catholique et protestante, ce sont des équipes : prêtres, pasteurs, laïcs hommes et femmes (entre 15 et 20 personnes). Ces équipes assurent le culte, des rencontres bibliques, du chant choral, pour les chrétiens. Elles animent en commun des groupes de parole, ouverts à toutes les personnes détenues.
Les aumôniers ont aussi la particularité d’avoir accès aux personnes détenues dans leurs cellules. Ils assurent ainsi un grand nombre de visites en cellules ; à tous ceux qui le souhaitent, quelle que soit leur religion, ou sans religion. Ces visites peuvent durer de quelques minutes à plus d’1 heure. Ils sont là pour écouter, réconforter, créer du lien. La visite en cellule, c’est aussi un temps où la personne détenue peut « recevoir ». Grâce à ce qu’elle a cantiné, elle peut offrir à l’aumônier café, gâteaux. Les aumôniers ont le souci d’être facilitateur de parole, de dialogue, entre les diverses personnes intervenant dans la prison.
Des représentants de plusieurs associations participent à des instances au sein de l’Administration pénitentiaire aux commissions « indigence » et « prévention suicide ».
Des actions communes sont menées par plusieurs associations, par exemple les confection, financement et distribution des colis de Noël.
L’accueil des familles
A l’origine, l’ACCUEIL SAN MARCO s’est créé pour répondre à un besoin bien précis : celui d’offrir un lieu abrité pour les familles qui stationnaient, par tous les temps, devant la porte de la prison en attendant l’heure du parloir. Un lieu où l’on trouvait des toilettes, la possibilité de prendre un café, de se poser un moment, à l’abri des intempéries. Un local avait été trouvé, juste en face des prisons Saint Paul-Saint Joseph. Depuis le déménagement à Corbas, l’ACCUEIL SAN MARCO est hébergé dans un local de l’Administration pénitentiaire. C’est un progrès, car c’est une reconnaissance par l’administration de la nécessité d’un tel lieu. Mais c’est un peu moins simple, car se retrouvent dans un même local, l’Accueil San Marco, les surveillants qui font l’appel des familles, un gestionnaire privé qui a en charge, les casiers, les bornes de prises de rendez-vous et la garde des enfants de plus de 3 ans, quand ils ne vont pas au parloir.
La 1ère démarche pour les familles est de faire une demande de permis de visite. Il faut constituer un dossier. L’ACCUEIL SAN MARCO assure donc l’information et l’aide à la constitution de ces dossiers et, quand le dossier est complet, le remet à l’administration. Les personnes ont la réponse par courrier, dans les 8-10 jours suivants, lorsqu’il s’agit de la famille proche et quand tout fonctionne normalement.
Ce lieu est aujourd’hui, un passage obligé : les familles déposent dans ce local les sacs et divers objets qui ne peuvent rentrer au parloir ; c’est là que se fait l’appel par le surveillant qui les fait entrer ensuite dans la prison. C’est là que se font les réservations pour les parloirs suivants.
Ce lieu, passage obligé, est aussi un lieu d’écoute et de partage. Le parloir est un moment capital, et pour la famille et pour la personne détenue, moment à la fois très attendu et redouté. L’angoisse est grande avant le premier parloir : c’est important de pouvoir en parler.
Tout cela peut se dire…se dit….dans des échanges individuels… L’équipe de l’ACCUEIL SAN MARCO est dans une écoute respectueuse, neutre et confidentielle ; tout peut se dire…se dit… entre les familles elles-mêmes. Elles sont toutes dans la même galère et ne se jugent pas. Elles échangent sur leurs vécus, leurs ressentis, leurs problèmes. Ce lieu d’accueil est ainsi lieu de partage.
Travailler en complémentarité
Les associations ont un conventionnement avec le SPIP ou l’Administration pénitentiaire, nationalement ou localement ; conventionnement qui régit leurs modalités d’intervention, et leurs obligations. Une fois ce cadre posé, elles gardent leur indépendance et leur autonomie d’action. Elles s’inscrivent toutes dans une démarche éthique et universelle fondée sur les droits de l’Homme. Elles travaillent avec les différentes instances de l’Administration et le SPIP en particulier. Elles sont aussi amenées à interpeller les autorités concernées si elles sont témoins de dysfonctionnement.
Dans chaque association, les intervenants bénéficient de formation, de soutien, de temps d’échange et de réflexion, sur leurs pratiques.
Beaucoup de monde franchit tous les jours les portes de la prison. Ce franchissement est important, comme lien entre le dedans et le dehors. Si la personne détenue subit une peine privative de liberté, c’est-à-dire la privant de la liberté d’aller et venir, il est important qu’elle ne soit pas privée de tout ce qui permet une vie humaine et digne. Cela pour 2 raisons essentielles :
1ère raison : Quelle que soit la gravité de l’acte commis, une personne n’est jamais réductible à ses actes. Elle doit être respectée et traitée avec dignité.
2ème raison : Si la société veut éviter la récidive, il est important de se comporter avec la personne détenue, comme on attend qu’elle se comporte envers les autres.
Dit autrement, comment demander à quelqu’un de se comporter en citoyen respectueux de la loi et de ses semblables, si soi-même, si l’institution ne respecte pas ses droits, n’est pas respectueuse à son égard ? Dans nos pratiques, nous sommes attentifs à tout ce qui peut mettre du lien humain, entre les partenaires, les surveillants, tous les divers intervenants. Nous pensons important la formation, à ce niveau, de tous, bénévoles ou professionnels.
Nous sommes attachés à tout ce qui peut permettre l’humanisation des prisons, à ce qui permet plus de respect de la dignité des personnes. Les conditions matérielles et d’organisation sont en cela très importantes. Mais les conditions de liens humains le sont grandement aussi.
Le monde de la prison, bien que les nouvelles prisons soient construites loin de lieux habités, ne doit pas rester étranger à la société. Tout ce qui favorise la communication à l’intérieur, mais aussi entre l’intérieur et l’extérieur, est important. Pouvoir parler, s’exprimer, dialoguer, communiquer, individuellement, et collectivement est essentiel.
Julienne Jarry, coordinatrice du GLCP, 24 novembre 2010
PS : à la maison d’arrêt de Lyon-Corbas, intervient également le CLIP qui donne des cours d’informatique et a, en permanence, une trentaine de détenus stagiaires. Ces stages durent environ 6 semaines, à raison de 12 heures/semaine et ensuite une trentaine de nouveaux stagiaires.
Au 1er janvier 2020 : 70.651 personnes incarcérées en France
Le nombre de détenus dans les prisons françaises est en baisse par rapport au chiffre d’octobre 2019 (70.818) mais en augmentation par rapport au 1er janvier 2019 (70.059), avec 71.061 personnes incarcérées, selon les chiffres de l’administration pénitentiaire publiés le 31 janvier 2020. Ainsi, 82.860 personnes étaient placées sous écrou, dont 12.209 sous surveillance électronique ou à l’extérieur.
Cette augmentation s’explique surtout par une forte hausse du nombre de personnes prévenues en détention ; elles représentent aujourd’hui 29,8% des personnes détenues.
Le nombre de personnes écrouées non détenues est en augmentation de 9,1% par rapport au 1er janvier 2019. Il y a une petite hausse du nombre de placements sous surveillance électronique (11.558) mais on est en dessous du chiffre de juillet 2019 : 11.615. Quant aux personnes en placement extérieur non hébergés, elles sont 651.
Pour finir, depuis le record de 894 mineurs détenus en juillet 2019, la baisse du nombre de mineurs écroués se poursuit avec 816 mineurs.
La densité carcérale, à 115,7 %, reste stable sur l’ensemble des Directions Interrégionales et des établissements.
Pour avoir l’ensemble des données chiffrées, rendez-vous sur le site du Ministère de la Justice en cliquant ici.
La mesure mensuelle de l’incarcération au 1er octobre 2018 est accessibleici.
« La force de la loi, l’humanité du juge » Isabelle Rome
Isabelle ROME, magistrate, haute fonctionnaire à l’égalité Femmes-Hommesau Ministère de la Justice, et auteure
Le vendredi 31 janvier au
Novotel de Bron, environ soixante-dix personnes étaient présentes avec Isabelle
ROME, qui proposait un exposé autour du thème « La force de la loi,
l’humanité du juge ».
Un parler vrai, un exposé
brillant et plein d’humanité, où les questions de fond se mêlaient aux
questions d’actualité, a permis de percevoir les enjeux éthiques et humains que
tout acte de jugement implique. Voici un écho de cet exposé.
La loi nous protège
Elle
protège la société mais il reste au juge à l’interpréter en fonction des faits
et des personnes. L’appréciation des faits se fait aussi en tenant compte de la
personnalité du justiciable. La loi pénale doit être appliquée à la lettre,
mais il est nécessaire d’avoir tous les éléments (caractère du délit, preuves
de la responsabilité, de l’intentionnalité) pour juger. Si un élément n’est pas
présent, le juge a nécessité de le faire exister par les questions qu’il va
poser.
Quand
le justiciable est dans une dénégation, c’est difficile à entendre et difficile
à juger. Dans ce cas, il est encore plus nécessaire de garder en tête les
grands principes fondamentaux et les critères donnés par le code de procédure
pénale.
Pour
les personnes récidivistes, il est important de regarder aussi comment ne pas
attenter à leur liberté pour que la sanction soit proportionnée à l’acte commis,
cela veut dire tenir compte des actes antérieurs, du temps déjà passé en
prison, et de la gravité de l’acte à juger.
Pour
un juge, c’est rassurant, de pouvoir se dire qu’on a interprété la loi le
mieux possible. Et là, c’est tout l’intérêt de l’écriture de la motivation de
la décision, devenue aujourd’hui obligatoire. On peut penser qu’on s’est
trompé, mais se dire « J’ai appliqué la loi à la lettre, j’ai laissé le
moins possible la place à mon arbitraire » ; cela donne une
meilleure conscience.
Quelques points concrets
d’actualité
On
parle beaucoup de « féminicide », à la lettre, c’est tuer une
femme parce que c’est une femme. Dans le meurtre d’une femme par son conjoint :
ce qui est mis en cause c’est le lien conjugal ; l’homicide sur conjoint,
ça existe dans la loi et il est requis de façon générale une condamnation à
perpétuité.
Si
on créait une loi « spécifique » pour les féminicides, ça voudrait
dire que dans une cour d’assises, il faudrait répondre, non seulement aux
questions sur les circonstances du meurtre, la personnalité de l’accusé, mais
aussi à la question « est-ce que la mort a été donnée parce que c’est
une femme ? » et là ça devient impossible à évaluer – créer une loi
pour les féminicides, c’est sans doute une fausse bonne idée.
Dans
la justice, il y a eu aussi des avancées dans une compréhension psychologique. Les
juristes ont mis plus de temps à prendre conscience des mécanismes qui se
jouent chez les femmes victimes, notamment concernant l’emprise, la domination
et les dépendances affectives. Avant, on considérait les femmes comme
ambivalentes, alors qu’aujourd’hui, on sait que ça fait partie de ce processus
du fait d’être victime. Maintenant, la prise de conscience que ce n’est pas
normal de faire violence, voire de tuer une femme et encore moins de se faire
agresser est beaucoup plus présente. La formation des magistrats est
nécessaire, sans doute aussi pour faire entrer les termes dans la loi et le
code pénal.
Un
autre point qui fait actuellement débat : «la possibilité pour le soignant
de déroger au secret médical ». Pourquoi ?
Il y
a un constat : un certain nombre de femmes meurent, alors qu’elles avaient
consulté plusieurs fois mais aucun signalement n’avait été fait. Face à cela la
Justice s’est remise en cause, et il a été demandé à l’Inspection générale de
la Justice de mener une enquête approfondie.
Sur soixante
homicides ayant été jugés, six victimes avaient un cheminement médical avant le
coup fatal. Les soignants peuvent porter les faits devant la justice, s’ils
considèrent qu’il y a un danger vital immédiat et que la victime est sous
emprise. Cette notion d’emprise est encore à décrire.
Une
posture éthique
Le
Juge ne peut s’exprimer sur les affaires qu’il a jugées et sur ses motivations,
du moins au-delà de la motivation écrite de sa décision. Il ne peut pas commenter
une décision de justice dans les medias même en réponse à des attaques.
Au
cours du procès, la motivation qu’il va mettre en avant devant la cour et
l’accusé est déterminante et va permettre la mise en œuvre du principe contradictoire.
C’est lui qui va ouvrir au débat, il y a
donc une vraie éthique de la motivation. Cela implique que ce qui est présenté
soit lisible et compréhensible, par tous, les jurés, les avocats, les accusés,
les plaignants, et les gens dans la salle. Il ne doit blesser aucune des deux
parties et ne pas hypothéquer l’avenir des justiciables par des commentaires
inutiles.
L’application
de la loi, c’est aussi une manière d’être à l’autre. C’est toujours un humain
en face d’un humain, et on ne peut l’oublier. La loi est toujours au service de
l’humanité et de la société, c’est un outil de paix sociale. Le juge doit
toujours regarder la personne accusée en face au moment de l’énoncé de la
sentence, et aussi la société. Isabelle Rome dit être portée par la philosophie
d’Emmanuel Levinas : l’expérience d’autrui prend la forme du visage.
Envisager l’autre dans sa singularité, sans oublier que chaque être s’inscrit
dans un espace social. D’autres philosophes nourrissent aussi sa réflexion, notamment
J.J. Rousseau : « De toutes les vertus, la justice est celle qui contribue
le plus au bien commun des hommes. » et Pascal : « La
justice sans la force est impuissante, la force sans la justice est
tyrannique. »
La loi est un outil au service d’un mieux vivre ensemble au service de l’humanité
On a
fait évoluer l’émancipation des femmes depuis l’après-guerre. Parfois, la loi
booste l’évolution des mœurs. Par exemple, la parité en politique et dans les
conseils d’administration. Ce qu’on entend : « On privilégie les
femmes et pas la compétence », ou bien : « On n’en trouve pas,
pas de disponibles… ». Cependant, on constate qu’il y a 40 pour cent de
femmes actuellement à l’assemblée, en 1997, il y en avait seulement 12
pour cent.
D’autres
exemples interrogent aussi les pratiques, en particulier dans le cas de condamnation
d’un parent pour homicide ; quelle serait la possibilité de suspendre
l’autorité parentale ? Pourrait-on faire entrer dans les mœurs de la
justice, la possibilité de suspendre l’autorité parentale du condamné, et suspendre
le droit de visite, ce qui n’est pas forcément le cas actuellement. Comment garantir
la liberté individuelle sans nuire à d’autres personnes de l’entourage ?
On
ne peut jamais brandir le droit comme un étendard. C’est toujours la recherche
d’un mieux vivre ensemble.
Des questions de société demeurent
Comme
juge des libertés, le maintien des étrangers en détention fait apparaitre des
vrais dilemmes, mais il est parfois difficile de faire autrement.
Par
ailleurs, certaines polémiques sont violentes. Notamment, autour de la laïcité,
« quand je vois une jeune femme voilée empêchée d’accompagner une
sortie scolaire. Cela a un effet dévalorisant. Il est important de penser aux
enfants et à leur ressenti de l’exclusion de leur mère, se resituer par rapport
à la personne humaine. »
« Le
blasphème ne doit pas exister dans une société laïque. Pour autant, avec la
diversité culturelle, je ne peux blasphémer parce que je respecte ceux que
je connais ».
La conscience de l’autre peut nous responsabiliser.
Nous sommes tous responsables de tous et devant les autres.
La réinsertion des personnes détenues : l’affaire de tous et toutes
Saisi par le Premier ministre sur la question de la réinsertion des personnes détenues, le Conseil Economique Social et Environnemental (CESE) a élaboré un rapport qui fait suite à un avis qu’il avait émis en 2006, dans lequel il s’inquiétait de retards pris dans la concrétisation de l’objectif de réinsertion.
Dans ce récent rapport, le CESE relève des points favorables intervenus depuis : la création du Contrôleur général des lieux de privation de liberté, la consécration de la mission de réinsertion confiée aux Services pénitentiaires d’insertion et probation (SPIP), le renforcement de l’individualisation des peines.
Mais, il relève que le nombre de personnes détenues continue à s’accroitre, sans lien avec l’évolution de la délinquance. Les personnes détenues sont aujourd’hui près de 71 000. Plus de 20 000 vivent dans une structure pénitentiaire (sur)occupée à plus de 150%. Dans les maisons d’arrêt, le taux d’occupation moyen dépasse 138%. Dans ce contexte, la priorité de l’administration pénitentiaire, à savoir la sécurité passe avant la préparation de la réinsertion.
Le CESE met en exergue des points dont il regrette l’insuffisante connaissance par le public :
– La détention ne contribue pas à la réduction de la délinquance et de la récidive
– Son coût est bien plus élevé que celui des alternatives à la détention, qui sont insuffisamment utilisées, comme les aménagements de peine
– Les populations jeunes, défavorisées, précaires, en mauvaise santé sont surreprésentées dans les prisons
– La détention les prive souvent de leurs droits, de leur capacité d’exercer un emploi et d’assumer leurs responsabilités, et elle accentue leur précarité
– Elle désocialise, déresponsabilise, conduit plus à la désinsertion qu’à la réinsertion
Tout ceci conduit le CESE à souhaiter des changements en profondeur.
Vous trouverez d’abord, un état des lieux de la détention et des autres mesures de justice, états des lieux sur lequel le CESE se fonde pour établir ensuite ses propositions. Ensuite, ce sont les préconisations du CESE qui seront présentés telles qu’il les a lui-même formulées.
Les Cahiers d’études pénitentiaires et criminologiques ont publié une nouvelle étude des représentations des Français sur la prison. L’objectif était de mettre à jour la perception par la population d’une institution qui peut apparaître opaque depuis l’extérieur, et de chercher à en appréhender les caractéristiques socio-démographiques.
Synthèse établie à partir des Cahiers d’études pénitentiaires et criminologiques n° 49 Septembre 2019 Direction de l’administration pénitentiaire Document intégral
Méthodologie
L’enquête de 2018 sur les représentations des Français de la prison est la 4ème édition d’une étude lancée par le Genepi en 1995, entièrement reprise par le bureau des statistiques et des études de la Direction de l’Administration Pénitentiaire depuis 2007, avec la sous-direction des statistiques et des études du ministère de la Justice. Il s’agit d’un questionnaire visant les personnes majeures résidant en France métropolitaine, pratiqué de façon aléatoire par téléphone en mai et juin 2018. Conduit par l’institut Ipsos auprès de 3002 personnes. Les thématiques : les représentations des Français des personnes en prison (personnes détenues et personnels de surveillance), les conditions de vie en prison, la justice pénale et les évolutions souhaitées.
Une représentation assez réaliste des
caractéristiques socio-démographiques des personnes détenues
Les Français se
représentent une population détenue comme une population jeune, principalement
masculine, avec une part importante de personnes étrangères et sans emploi. Ils
évoquent avant tout des personnes détenues pour des infractions relatives aux
biens et aux stupéfiants.
Une population détenue jeune : pour
70% des personnes interrogées, la majorité des détenus a moins de 30 ans, ce
qui est en fait le cas de 43 % des détenus au 1er octobre 2018.
Les femmes sont vues à juste titre
comme minoritaires en détention. La part des femmes écrouées, en fait 4% au 1er
octobre 2018, est toutefois surestimée puisqu’une grande majorité des
répondants pensent qu’il y a près d’un tiers de femmes en détention, et que
seulement 2% pensent qu’elles représentent moins de 5% des personnes détenues.
A noter que les femmes questionnées
imaginent une part plus élevée de femmes en détention que les hommes.
Les personnes interrogées surestiment
la part des étrangers dans la population des personnes détenues et ceci
d’autant plus que leur niveau d’études est faible. En effet, alors que la part d’étrangers
parmi les détenus est de 23% au 1er octobre 2018, 60% des personnes interrogées
pensent que c’est plus d’un cinquième des personnes détenues qui sont de
nationalité étrangère, et pour 20% ce serait même plus de la moitié des détenus.
Ceux qui ont un niveau de diplôme moindre surestiment la proportion de
personnes étrangères en prison : ceux qui n’ont pas le baccalauréat (29%) sont
deux fois plus nombreux que les BAC+3 et plus (14%) à penser qu’il y a une
majorité d’étrangers dans les prisons.
Des personnes détenues qui inspirent
la crainte
Les personnes interrogées éprouvent
une certaine crainte à l’égard de la population détenue. Quant aux appréhensions
qu’ils auraient s’ils venaient à être incarcérés, les violences physiques ou
psychologiques des codétenus, l’insécurité, le racket, reviennent dans 30 % des
réponses données. C’est donc le fait de côtoyer d’autres personnes détenues qui
est le plus craint par les personnes interrogées, plus encore que la condition
de personne détenue et la privation de liberté.
De la considération et peu de défiance
pour les personnels de surveillance
Bien que
l’exercice professionnel du surveillant soit parfois méconnu dans ses réalités
quotidiennes, la perception globale qu’en ont les personnes interrogées est
homogène : il s’agit d’un métier aux conditions de travail difficiles, qui
inspire de la considération.
Quant aux craintes qu’ils auraient à
être incarcérés, les Français ne citent les surveillants que pour 2% comme objet
de ces craintes.
Pour 9 sur 10 des interrogés, ce
métier est un métier de relation humaine, d’ordre et de sécurité, et elles ne
souhaitent pas le voir privatisé.
Pour autant, seuls 9% des enquêtés
aimeraient effectuer ce travail. 95% le considèrent comme étant dangereux, et
quasiment autant déplorent son manque de reconnaissance et de trop faibles
effectifs.
Des conditions de détention perçues
comme difficiles
Les représentations des conditions de
détention regroupent la façon dont les personnes interrogées se représentent
les biens auxquels ont accès les personnes détenues, dont ils perçoivent
l’occupation des cellules ou encore dont ils envisagent les droits des détenus.
Une
représentation parcellaire de l’accès aux biens en détention
Les
personnes interrogées savent qu’il existe des biens gratuits et des biens
payants en prison. Ils ont toutefois tendance à surestimer le champ des biens
gratuits et à sous-estimer celui des biens payants.
Par
exemple, la gratuité du téléphone fixe est particulièrement surestimée : plus
de 40 % des personnes interrogées pensent que les détenus y ont accès sans
payer ce qui est faux.
Des
représentations marquées par la surpopulation et le manque d’intimité
La grande majorité des Français se
représentent en effet des prisons sur-occupées. Pour 87 % d’entre eux, la
plupart des prisons françaises accueillent plus de personnes détenues qu’elles
n’ont de places et 33 % pensent que c’est le cas pour toutes les prisons. La
surpopulation est d’ailleurs le premier sujet concernant les prisons françaises
cité comme le plus marquant.
Le
manque d’intimité du fait de la surpopulation est aussi la troisième crainte de
l’incarcération la plus donnée. L’idée d’un lieu sans intimité est d’ailleurs
partagée par les deux tiers des personnes interrogées qui se représentent par
exemple des toilettes rarement, voire jamais cloisonnés à l’intérieur des cellules.
Une
vision faussée des droits des détenus
Si les Français
interrogés sont conscients du droit des personnes détenues à pratiquer leur
religion et à accéder à l’assurance
maladie, ils ont pour le reste une vision assez déformée des droits en
détention.
Une très large majorité de personnes
pense à raison que les détenus ont le droit de pratiquer leur religion (93 %)
et ont accès à l’assurance maladie (81%). De même, les personnes interrogées
sont bien au fait que les personnes détenues n’ont pas le droit de posséder un
téléphone portable (86 %).
Les personnes détenues ont d’autres
droits, peu connus par les personnes interrogées.
Par exemple, alors que la majorité des
personnes détenues a le droit de vote, seulement 37 % des personnes interrogées
pensent qu’ils conservent ce droit de voter.
Au
contraire, les personnes interrogées peuvent se représenter certains droits en
détention auxquels les détenus n’ont pourtant pas accès, tel le droit d’accès à
internet.
Une attitude complexe à l’égard du phénomène de la peine d’incarcération
En premier lieu la suppression de
la prison n’est pas envisagée…
Les personnes
consultées ne remettent que très peu en cause l’existence de la prison (4%).
Les rares personnes qui envisagent sa suppression sont plutôt jeunes et
diplômés.
Ainsi, parmi les 18-34 ans, 10% des
diplômés de niveau bac+3 ou plus sont favorables à la suppression des prisons.
Cette opinion radicale sur le devenir de la prison va de pair, chez les plus
jeunes, avec la perception accentuée de difficultés inhérentes à
l’administration de la prison.
Au-delà, la plupart des personnes
interrogées expriment une volonté de durcir l’application des peines. Trois
quarts pensent que les personnes condamnées à perpétuité doivent réellement
rester en prison à vie. 80% pensent que certaines infractions ne sont pas assez
punies, pour seulement 39% qui pensent que des infractions sont trop punies.
Là
encore les plus diplômés sont plus tempérés : les partisans de
l’application stricte de la peine sont 61% chez les diplômés au moins bac+3,
contre 80% chez les non diplômés.
… mais le développement des peines alternatives est plébiscité
87 % des personnes interrogées sont
favorables au développement de mesures permettant d’exécuter une peine hors de
la prison, telles le travail d’intérêt général ou le bracelet électronique.
Cette volonté est encore une fois plus forte parmi les plus diplômés.
Et ceci n’est pas incompatible avec
l’expression d’une volonté de durcissement puisque parmi les partisans de
l’application stricte de la peine à perpétuité, 64% sont en même favorables au
développement de mesures hors de la prison.
Ces positions sur l’application des peines (application stricte de la perpétuité – alternative à la prison) varient en fonction des types d’infraction. Les actes cités comme n’étant pas assez sévèrement punis sont principalement les actes à caractère sexuel, alors que ceux cités comme étant trop punis sont les vols et les actes de petite délinquance.
Pour aller plus loin
Exposition à Lyon : Prison, au-delà des murs
Jusqu’au 26 juillet 2020
Quelle est la réalité des prisons aujourd’hui ? L’exposition vous propose une réflexion sur notre système pénitentiaire hérité du 18e siècle. Conçue de manière immersive, elle explicite, par le biais de récits d’anciens détenus mais aussi de représentations de notre imaginaire collectif, le paradoxe selon lequel la prison isole l’individu pour le punir et protéger la société, tout en visant à sa réinsertion. Un parcours parallèle vous invite à explorer, par le théâtre, le quotidien des détenus.
Musée des Confluences 86 quai Perrache, 69002 Lyon – France (+33) 04 28 38 12 12
du mardi au vendredi de 11h à 19h samedi et dimanche de 10h à 19h jeudi nocturne jusqu’à 22h
La Fondation Après-Tout est placée sous l'égide de la Fondation de France
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